Article paru le 3 septembre 2008 sur http://www.journaldunet.com

Vidéo : un bon moyen de réveiller les intranets
Selon Comscore, le nombre de vidéos vues sur Internet a dépassé le nombre de requêtes dans les moteurs de recherche. Preuve s’il en fallait encore que la consommation de vidéo s’impose comme un usage à part entière, désormais incontournable pour l’entreprise.

Vidéo en Intranet : pour quoi faire ?
L’entreprise doit prendre en compte des utilisateurs – et notamment les jeunes talents sur lesquels elle souhaite capitaliser – qui ont intégré dans leur comportement la consommation de vidéo, que ce soit par plaisir, pour s’informer ou se former.

 

Balayer d’un revers la main le sujet en se disant que le collaborateur a mieux à faire, c’est à la fois se priver de moyens de communication top down ou bottom up efficaces et rentables – nous y reviendrons – mais c’est aussi donner de l’entreprise une image conservatrice et frileuse déphasée par rapport aux attentes d’une nouvelle génération, qu’on l’appelle « Y » ou non…

Ne pas ignorer les obstacles
Toutes les entreprises qui ont commencé à mettre en oeuvre de la vidéo sur des scénarios Intranet – et contrairement au message de la plupart des fournisseurs de plateformes – arrivent toutes au même constat : c’est complexe. Une complexité qui demande de prendre le sujet à bras le corps suffisamment tôt pour initier une courbe d’expérience et avancer par itérations simples.

Le chantier incontournable : l’infrastructure
C’est sûrement le moins drôle, le moins visible, le plus complexe et pourtant le plus incontournable. Si le parc machines n’est pas adapté, si l’infrastructure réseau ne suit pas la mise en oeuvre de la vidéo est de fait compromise.

Dans cet exercice, la DSI joue un rôle naturel et normal de protection des « tuyaux » vis-à-vis des applications métier. Le spectre du réseau qui s’écroule et qui paralyse l’entreprise a de quoi refroidir. Un dialogue avec la DSI est de fait essentiel, d’autant que les solutions au problème existent.

Citons parmi elles : la mise en place en interne d’un mini CDN (Content Delivery Network) à base de serveurs de cache (même simple) pour éviter les goulets d’étranglement ; la restriction de serveurs de diffusion à un nombre simultané d’utilisateurs limité, l’étalement des promotions des vidéos en interne (mailing fractionné, bannières tournantes à fréquence limitée, etc.).

Contrairement aux craintes habituelles, nous avons constaté chez la plupart de nos clients que la consommation des utilisateurs est lissée dans le temps et les pics rares – hormis les Lives qui peuvent de fait nécessiter une infrastructure spécifique (multicast versus unicast).

Le parc de machines doit naturellement disposer de cartes son et de haut-parleurs ou de casques. Ce n’est pas toujours le cas. Offrir à ses collaborateurs un casque à quelques euros peut être une initiative très bien perçue (notamment pour les équipes en open space), tout comme la mise à disposition de machines bien équipées en libre service, dans des salles de réunion, pour des collaborateurs ne disposant pas de PC, comme c’est souvent le cas dans la grande distribution par exemple.

Communication corporate Top-down
Il est fréquent de voir des chantiers de vidéo sur Intranet démarrer avec les voeux du président. Chantier qui a l’avantage d’ouvrir bien des portes du coté de l’infrastructure et de la DSI. Mais qui a aussi l’inconvénient d’être un exercice particulièrement périlleux pour le PDG, notamment s’il est mené en solo face caméra.

Seuls des habitués de ce genre d’exercice s’en sortent avec les honneurs – et encore, tant le sujet est difficile. Mieux vaut commencer par exemple par des points trimestriels faits par le directeur commercial à destination de ses forces de vente sur le terrain ou par l’annonce de faits importants (résultats financiers ou autre), en mode « interview ».

L’usage de powerpoints synchronisés peut à ce titre constituer un excellent support. On privilégiera un contenu mis à disposition « on demand » (en différé donc) plutôt qu’un vrai live (diffusion en direct), si on débute dans ce type d’exercice. En revanche, une fois rodé,  le live avec session de questions – réponses à la fin sera naturellement très apprécié par les collaborateurs.

Dans tous les cas, l’accompagnement éditorial préalable au tournage et la conduite de l’interview par un professionnel jouent un rôle déterminant dans le rendu.
L’avantage de ce type de communication est de garantir de bout en bout la complétude et l’exactitude du message que l’on souhaite faire passer.

La vidéo va aussi trouver toute son efficacité dans la présentation en interne des métiers de l’entreprise (notamment des métiers de terrain), dans le suivi des grands événements de l’entreprise et dans son quotidien, bref dans tout ce que le texte seul peut difficilement faire passer, à commencer par les émotions, le « pouls » de l’entreprise.

L’implication des collaborateurs dans ces formats corporate, y compris Films décalés, lip dubs ou autres productions est un formidable levier pour la reconnaissance de l’individu dans l’entreprise.

S’informer et se former
– Les possibilités en la matière sont nombreuses. J’en citerai deux qui, par retour d’expérience, semblent parmi les plus performantes et les plus rentables : La couverture d’une formation de type « Intervenant avec slides Powerpoint » sous forme d’un webcast accessible on demand, la vidéo et les slides étant synchronisés avec une table des matières. Le coût unitaire de production de ce type de contenu est aujourd’hui si faible que son usage commence à être systématisé chez les entreprises qui ont perçu le levier possible, à commencer par le secteur bancaire.

Donner la possibilité aux collaborateurs de revoir tranquillement la formation à laquelle ils ont assisté, mais surtout donner la possibilité aux absents d’accéder – certes avec moins d’interactivité – à la formation, à la parole de l’expert, bien au-delà de ce que peut amener un simple slideshow, créent une valeur qui rend dérisoire le coût de création du support.
– L’interview d’un expert de l’entreprise en mode « 3 questions à » : rapide et simple à produire, il permet de faire monter en compétences les collaborateurs de l’entreprise simplement et sans les mobiliser pour une formation spécifique : c’est le micro-learning.

La communication bottom up ou le User Generated Content décliné en entreprise
C’est à la fois l’un des domaines d’application les plus intéressants, car il permet de capter la connaissance tacite de l’entreprise, mais aussi l’un des plus difficiles à mettre en oeuvre.

Il suffit de jeter un coup d’oeil à YouTube pour s’en convaincre : les utilisateurs regardent des vidéos, publient des vidéos qu’ils ont enregistré sur leur télévision ou qui leur ont été envoyées. Rarement des vidéos qu’ils ont conçu eux-mêmes. En entreprise, l’exercice est encore plus complexe car le sentiment d’être jugé, observé par ses pairs et sa hiérarchie constitue souvent un inhibiteur fort. Ceux qui craignent de mettre en ligne ce type de plateforme par peur des dérapages se trompent : le risque n’est pas d’avoir des contenus inappropriés, c’est de ne pas avoir de contenus du tout. Le succès d’une plateforme UGC en intranet passe notamment par :

– l’identification de « leaders » qui vont être les locomotives de la plateforme, les « reporters » internes. Equipés de petites caméras à disque dur et d’un logiciel de publication ultra simple vers la plateforme UGC, ils vont interviewer en interne ou en externe sur les thématiques qui les passionnent. Une formation (même très courte) sur les basiques de l’interview (d’un point de vue éditorial ou technique) est fortement recommandée.
– La possibilité pour les utilisateurs de publier autre chose que des vidéos. Slideshows par exemple (façon Slideshare), billets, mais aussi photos. Bon nombre de métiers ont un savoir faire qui se transmet par la photo plus que par le texte. Un exemple ? Dans la grande distribution, les photos des bonnes pratiques en matière de rayonnage (en interne ou chez la concurrence) sont des informations clés qui se matérialisent par des photos et non par du texte. Ces supports (slideshows ou photos) ont l’avantage pour les collaborateurs d’être beaucoup plus simples à produire que des vidéos.
– L’animation éditoriale de la plateforme par un administrateur qui va mettre en valeur des contenus publiés, gérer la newsletter, et qui aura aussi pour charge d’alimenter la plateforme en contenus lors d’un « passage à vide » en matière de publications.

Bon nombre d’intranets s’endorment peu à peu pour se réduire à de simples portails déshumanisés  vers les applications métier de l’entreprise. L’usage de la vidéo, que ce soit dans un scénario communication corporate top-down, de formation ou de partage 2.0  de la connaissance constitue une formidable opportunité de « réveiller » ces intranets endormis.